Au milieu de tous ces acteurs du monde de l'entreprise, Deza Nguembock a de quoi avoir le sourire, à bientôt 45 ans, elle est à la tête de sa propre agence de communication spécialisée dans la sensibilisation au handicap. Un sujet qu'elle connaît bien et qui fait partie de sa vie, puisqu'elle est elle même atteinte d'une poliomyélite. Une maladie qui ne l'a jamais empêché de mener à bien ses projets, mais elle lui a tout de même posé de nombreux problèmes durant sa vie professionnelle, pas nécessairement à cause des effets physiques de sa maladie, mais plutôt de la faute du regard qu'on a pu poser sur elle.

Quand j'ai commencé à chercher du travail, je mettais sur mon CV la mention de travailleur handicapé, et pendant un  certain temps je n'ai n'avais aucune réponse, et le jour où j'ai enlevé cette mention de travailleur handicapé, mon téléphone n'a pas arrêté de sonner, remarque-t-elle avec un brin d'amertume.  Là, c'était la première prise de conscience pour moi que le fait d'être handicapée était un problème d'intégration professionnel.

Lorsque Deza finit tout de même par décrocher un CDD de six mois dans une agence de marketing, les désillusions ne s'arrêtent pas. Le CDI qu'on lui avait promis lui est finalement refusé sans aucunes raisons valables. La goutte d'eau qui lui donne la désagréable impression d'être victime de discriminations.

Il faut dire que j'ai quand même plusieurs handicaps, d'abord je suis une femme, une femme handicapée, et une femme noire, trois handicaps qui peuvent être lourds dans un milieu comme celui ci, remarque-t-elle lucidement. Après un petit parcours dans une autre entreprise,  j'ai donc décidé de partir créer ma propre agence.

 

Des organismes pour aider les entrepreneurs handicapés

 

Deza est loin d'être la seule à se lancer dans la création d'une entreprise, ils sont actuellement près de 75  000 à posséder un statut d'indépendants, soit 8% des travailleurs handicapés. Pour les accompagner dans leurs projets, ils peuvent obtenir du soutien auprès du CCAH (Comité national coordination Action Handicap)  une association nationale  dont l'objectif est d'améliorer la vie quotidienne des personnes handicapées et de favoriser le vivre ensemble. Il vient justement de publier en partenariat avec un autre organisme, Handiréseau, les cahiers du CCAH, une documentation gratuite qui propose des pistes pour favoriser l'entrepreneuriat des personnes en situation de handicap. Au vu des discriminations à l'embauche persistante dans la société française  l'entrepreneuriat semble en effet être une bonne solution pour ces citoyens qui restent au chômage deux fois plus longtemps que les valides.

Ce phénomène de l'entrepreneuriat vient de plusieurs raisons, selon Marie Anne Montchamp, ancienne secrétaire d'état aux personnes handicapées et présidente de la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA). C'est d'abord la difficulté de trouver un emploi, et donc l'idée que créer son propre emploi c'est parfois une solution pour se lancer. Il y a aussi l'idée que la vie en entreprise est bourrée de contraintes, et que les personnes en situation de handicap y sont mal comprises. Créer son emploi, son entreprise, c'est se donner une liberté, des marges de manœuvres, et une vrai capacité à avoir un rôle économique et sociale hors de l'entreprise.

Il est donc probable que de nombreux travailleurs handicapées se décident à suivre la même voie que Deza et bien d'autres dans les années à venir. Reste également à voir si les mesures préconisées par le CCAH seront prises en compte par les pouvoirs publics.

Sur le même thème

Quelles solutions d'accompagnement pour les aidants actifs ? Avec le CCAH et Malakoff Médéric

Les Lauréats du CCAH : Une cérémonie pour promouvoir l'inclusion des personnes handicapées

Reportage : ATF, une entreprise adaptée et un projet pour l'emploi des personnes handicapées