Rio 2016
Markus Rehm ne sautera pas avec sa prothèse face aux athlètes valides à Rio
Le champion allemand de saut en longueur renonce aux Jeux olympiques mais participe aux Paralympiques. Des règles adoptées récemment obligent l’Allemand à prouver que sa prothèse ne constitue pas un avantage sur ses adversaires valides.
En 2014, Markus Rehm est le premier athlète handisport a être sacré champion national de saut en longueur d’Allemagne, toutes catégories confondues. Les formidables performances de ce sportif le qualifient pour les championnats d’Europe 2014, ce qui créé la polémique et relance le débat sur l’équité entre les athlètes valides et les athlètes handicapés. Privé de participation aux Championnats d’Europe, Markus Rehm annonce récemment son renoncement aux épreuves des valides des Jeux olympiques 2016.
Un palmarès hors du commun
Markus Rehm a perdu sa jambe droite à l’âge de 14 ans, dans un accident de wakeboard. Aujourd’hui âgé de 27 ans, c’est un athlète allemand spécialiste du saut en longueur. Il est médaillé d’or au Jeux olympiques paralympique de Londres, en 2012, grâce à un saut à 7,35 mètres. Il devient champion du monde handisport en 2013, avec un saut à 7,95 mètres, à Vénissieux, près de Lyon. Markus Rehm se trouve alors déjà très proche des performances des valides. En 2014 lorsque l’athlète est sacré numéro un dans son pays, il devance des athlètes comme Christian Reif et Sebastian Bayer aux championnats d’athlétisme d’Allemagne, à Ulm, grâce à un saut record pour un athlète handicapé de 8,24 mètres. Cette performance est la cinquième meilleure performance européenne cette année là. Ses résultats sportifs lui permettent de se qualifier pour les championnats d’Europe 2014 de Zürich. Cependant, cette victoire relance le débat de l’équité entre valides et handicapés dans les compétitions sportives. La Fédération allemande d’athlétisme refuse de sélectionner Markus Rehm pour participer à cette compétition parmi les athlètes valides. La fédération estime que la prothèse de Rehm est un avantage déloyal par rapport aux athlètes valides. Elle s’appuie sur la réglementation des compétitions internationales stipulant que l’utilisation de toute technologie ou dispositif susceptible de procurer un avantage à son utilisateur est interdit. La prothèse agirait comme un ressort aidant Rehm à se propulser lors de ses sauts. Le sauteur prend en effet son impulsion sur sa jambe droite, équipée de sa prothèse. « Le principe d’équité dans le sport doit passer avant celui de l’intégration », argumente Eckhard Meinberg de l’Université allemande du sport dans le quotidien Der Spiegel. De son côté, l’athlète Sebastian Bayer dénonce une inégalité, tandis que Christian Reif, lui, déclare : « Avantage ou pas, pour moi tu as gagné, car tu as montré de quoi les athlètes handicapés sont capables. »
Un sujet qui divise
D’autres sports ont connu certaines restrictions par le passé, comme la natation où l’on avait interdit l’utilisation des combinaisons en polyuréthane. On peut aussi citer le cas d’Oscar Pistorius qui avait gagné le droit de courir aux côtés des valides lors des JO de 2012, le Tribunal arbitral du sport se trouvant dans l’incapacité de démontrer quelconque avantage qu’aurait pu lui conférer ses prothèses. A ce jour les études scientifiques ne parviennent pas à déterminer concrètement si les athlètes paralympiques tirent un avantage de leurs prothèses. Alors peut-on écarter un athlète handisport sans que l’avantage de son matériel ne soit démontré ? Le sujet divise jusque chez les athlètes handisport. Marie-Amélie Le Fur, athlète handisport, se prononce pour l’interdiction des compétitions mixtes. A moins d’un an des Jeux olympiques de Rio, la Fédération internationale d’athlétisme tente de se prémunir contre un nouveau cas Pistorius en faisant paraitre une nouvelle règle : « Tout recours à une aide mécanique, à moins que l'athlète soit en mesure de prouver que celle-ci ne lui fournit aucun avantage à même de troubler la compétition avec les athlètes n'ayant pas recours à cette aide, est interdit ». Plutôt que de trancher, celle-ci entretient le flou sur la problématique. C’est encore une fois aux athlètes concernés de démontrer juridiquement aux autorités sportives leur droit de participer aux compétitions des valides.
Dans le cas de Markus Rehm, celui-ci s’oppose à ces démarches juridiques et renonce donc à une participation aux JO de Rio 2016. En revanche, il participera aux Jeux paralympiques, du 7 au 18 septembre. A l’issue des Jeux, Markus Rehm intégrera un groupe de travail au sein de l’IAAF, afin de réfléchir sur la problématique de l’intégration des athlètes handisport, notamment en vue des Jeux mondiaux organisés en Pologne en 2017 pour les sports non inscrits au programme des JO. Un sujet qui n’a pas fini de faire débat.
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