Cinéma
J'avancerai vers toi avec les yeux d'un sourd
Laëtitia Carton a dédié son film à Vincent, un ami sourd, décédé il y a dix ans avec qui elle devait co-réaliser ce projet. C'est lui qui l'avait initiée à la langue des signes. Vincent était doublement ostracisé du fait de son handicap et de son homosexualité. Comme beaucoup de sourds, Vincent a subi une éducation oraliste, avec un déni de sa surdité, ce qui a occcasionné chez lui des souffrances. Il a découvert sur le tard la langue des signes, ainsi que la culture sourde, avant de s'épanouir dans ce monde.
Cette communauté fait face à une discrimination sociale, par exemple elle n'est pas prise en compte lors des débats électoraux, ni lors des grands événements comme les attentats de novembre. C'est ce que déclare la réalisatrice, sur le plateau de l'émission Vivre FM c'est vous sur notre antenne.
Un plaidoyer pour la langue des signes et la culture sourde
Le parti-pris de la réalisatrice est de donner la parole aux sourds-signeurs qu'elle juge sous-représentés au cinéma. L'accès à la langue des signes leur permet d'être bien dans leurs baskets. A contrario, une jeune femme qui a été appareillée confie qu'elle n'a pas eu le choix. Cet appareillage est parfois vu comme une torture. De nombreux sourds n'ont pas eu de modèles étant enfants. La réalisatrice explique se sentir bien dans le monde des sourds. Elle aime leur convivialité. Elle confie aussi être fascinée par la langue des sourds car elle fait appel au geste, au regard et à l'émotion. Laetitia Carton nous confie que quand elle voyage, elle cherche d'abord à entrer en contact avec des sourds et malentendants.
Elle nous fait découvrir le quotidien des classes bilingues. On partage aussi une marche de personnes sourdes qui se termine à Milan, dont le but était de dénoncer le mépris de la culture et de la langue des signes. La chanteuse Camille a également contribué à ce long-métrage.
Un autre regard sur le handicap
C'est tout un univers qui s'offre à nous, que ce soit un enfant sourd qui intègre une école bilingue ou un chorégraphe sourd. On sent aussi l'empathie de la réalisatrice. Il y a de nombreux moments forts comme le concours de Miss ou les images de son ami Vincent à la fin du film. Le film est aussi l'occasion de s'interroger sur la différence car la surdité est parfois considérée comme une déficience à réparer. Le film s'attache délibèrément à la langue des signes qui nous est présentée avec émotion mais ne donne pas l'opinion des oralistes. L'humanité qui s'en dégage est sa principale force. Il ne nous montre pas des personnes handicapées mais des êtres qui communiquent autrement."
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