Sectes 3e âge

Les personnes âgées sous la menace des sectes

Les personnes âgées sont des cibles privilégiées
Les personnes âgées sont des cibles privilégiées
La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) adressera une mise en garde dans son futur rapport ; son secrétaire général, Hervé Machi, vient de dévoiler deux des principaux axes de ce document : annonce de risques réels et propositions de mesures protectrices pour les personnes âgées.

Hervé Machi dresse un état des lieux inquiétant du risque d’emprise sectaire pesant sur les personnes âgées. Dans une interview accordée au quotidien La Croix, il présente les conclusions du futur rapport de la Miviludes (l’organisation chargée de coordonner l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre des dérives sectaires).
Ce rapport, dont la publication a été repoussée à l’automne en raison de la démission de son président (Georges Fenech), tout juste élu député UMP du Rhône, donne deux explications à la mise en danger de cette catégorie de personnes : leurs ressources financières et une vulnérabilité due à l’âge et à l’isolement.


Des risques d’une importance variable


Les menaces existent quel que soit le lieu d’hébergement des personnes âgées. Les associations intervenant en maisons de retraite ne sont pas contrôlées par la Commission nationale d’agrément (contrairement à celles admises à intervenir dans les hôpitaux). La Miviludes craint « un risque d’infiltration des établissements spécialisés, via les organismes de formation du personnel ou les associations proposant leurs services aux résidents ».
Toutefois, il est précisé que ces structures (les hôpitaux et les maisons de retraite) disposent d’une protection particulière de la part de la loi, en ce qui concerne les dons ou legs accordés par les patients ; l’article 909 du code civil interdit formellement les legs au profit des bénévoles ou professionnels intervenant dans ces établissements. Cela  n’est pas le cas dans le cadre du domicile, où beaucoup de personnes âgées finissent pourtant leur vie.


Une menace plus grande pour les personnes vivant à domicile


La Miviludes déplore cette « faille dans le système " qui augmente les risques pour les personnes disposant d’une aide à domicile. Selon elle, les dons et legs devraient être réservés aux associations reconnues d’utilité publique : « afin que les grands réseaux hors de tout soupçon puissent continuer à bénéficier de la générosité des publics qu’ils soutiennent ».
Plusieurs escroqueries ont été signalées. Hervé Machi explique ainsi que « des proches l’alertent lorsque des mouvements qui se disent spirituels bénéficient des largesses testamentaires de leur parent âgé, voire de la totalité de ses biens ». Les escrocs usent de différentes techniques pour repérer leurs victimes : surveillance des cimetières et des annonces nécrologiques qui permet de « sélectionner » des personnes rendues plus vulnérables par le deuil et la solitude.


Un phénomène qui n’est pourtant pas nouveau


Ces modes d’escroqueries étaient déjà signalés par la Miviludes, en 2010, dans son rapport annuel remis au Premier ministre, François Fillon. La mission interministérielle y indiquait la nécessité d’une attention particulière, « en raison de situations peu visibles (aide au domicile) et de ce fait peu susceptibles de contrôle ». « La maltraitance des personnes âgées » ainsi que les captations de patrimoine par abus de faiblesse étaient elles aussi déjà dénoncées.


« Il ne faut pas exagérer le phénomène »


Le président de l’AD-PA (Association des directeurs de services aux personnes âgées), Pascal Champvert, a un point de vue plus nuancé sur cette question.
Selon lui, « dans les maisons de retraite, le risque d’emprise sectaire est très faible ». Les personnes âgées se trouvent dans des structures ouvertes, ce qui complique la tâche des escrocs qui privilégiant une certaine discrétion. De plus, le coût mensuel moyen, de 2 200 €,  limite fortement les ressources financières des résidents susceptibles "d’intéresser" les mouvements sectaires.
Pascal Champvert admet lui aussi que « les risques concernent davantage les personnes âgées vivant à domicile, car on ne sait pas toujours ce qui s’y passe ». Mais d’après lui, « il ne faut pas exagérer le phénomène ».